samedi, avril 20, 2024
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France: un site internet pour dénoncer les «complices» de l’islam

France: un site internet pour dénoncer les «complices» de l’islam




Un mystérieux site dont c’est l’objet affiché a vu le jour. Des internautes en attribuent la paternité au collaborateur parlementaire RN Damien Rieu, preuves à l’appui.





Faire des listes reste décidément une mauvaise habitude à l’extrême droite. Damien Rieu, collaborateur parlementaire de l’eurodéputé Rassemblement national Philippe Olivier, vient d’être épinglé pour avoir construit tout un site visant à dénoncer des «complices». De qui, de quoi ? Mystère, au premier abord.
Mais l’ébauche de plateforme mise en ligne récemment donne des indices notamment via son logo : «les complices» écrit en vert, le c en forme de croissant, le point sur le i remplacé par une étoile. Autant de symboles de l’islam.
Sous le titre, cette phrase : «Ils les financent, ils les protègent, ils relaient leur discours.» Acheté début novembre, le nom de domaine est à ce stade utilisé pour le seul déploiement du logo et d’une barre de recherche active mais qui ne renvoie à rien.
Sur Twitter, des internautes accusent Damien Rieu d’en être à l’origine preuves à l’appui.




Libération s’est entretenu avec ces anonymes, qui se présentent comme membres d’un «groupe de lutte contre toute forme de discrimination nommé Team Harmonium». Ils nous ont fourni des éléments, beaucoup, qui étayent leurs accusations.
Captures d’écran de conversations privées sur Twitter ou Telegram (une messagerie cryptée), messages vocaux (notamment de Damien Rieu) extraits desdites conversations, documents : ils ont infiltré l’organisation de ce site, qui apparaît avoir été orchestrée par le collaborateur RN.
Tout commence début novembre, lorsque Rieu diffuse sur ses réseaux sociaux un appel à volontaires. «Vous voulez agir concrètement contre l’islamisme, vous savez faire des recherches sur Internet et vous avez du temps libre ?
Je vous propose de participer à un projet d’investigations (sic) et de veille sur le sujet. Contactez-moi en mp Twitter. Partages appréciés», interpelle-t-il. C’est alors que les membres de la «team Harmonium» l’ont contacté.




Ils l’on contacté en se faisant passer pour des sympathisants et ont réussi à intégrer le groupe privé dédié créé sur Telegram par l’ancien cadre de Génération identitaire passé au RN, selon des échanges que nous avons pu consulter. 
Fort d’une soixantaine de membres, ce salon fermé a été entièrement consacré à la recherche d’éléments censés prouver que certains élus seraient des «complices» de «l’islamisme», des membres du groupe parlant même de «collabos».
Une très large part de ces échanges ont été capturés sous diverses formes par les infiltrés, qui nous les ont transmis. Il en ressort le rôle moteur de Rieu, le fait qu’il souhaitait rester discret, mais également qu’il s’est contenté de faire travailler les bénévoles mobilisés.
Il les invitait ainsi à faire des recherches ciblées et à stocker les éléments trouvés dans un espace dédié en ligne et à les transmettre par mail. Une fiche modèle était transmise aux nouveaux volontaires. Nous avons pu consulter celle de François Fillon.




L’ancien Premier ministre y est affublé d’une note de «complicité» de 7/10. Il y a aussi des éléments censés prouver qu’il serait compromis qui sont listés. Parmi ces «preuves», notamment le fait qu’il ait signé en 2004, alors qu’il était ministre de l’Education nationale, une circulaire pour «reporter les épreuves scolaires lors de l’Aïd»… 
La notice envoyée aux volontaires comporte également quelques conseils, comme de fouiller «réseaux sociaux, articles de presse, captures d’écran, vidéo YouTube» ou encore de «regarder sur le site observatoire de l’islamisation qui est très bien».  
Cette page, bien connue de la fachosphère, étale son hostilité à l’islam sous couvert de lutte contre l’islamisation.
Elle est tenue par Joachim Véliocas, un homme très proche de la mouvance identitaire, qui a par exemple participé à la Convention identitaire 2009 ou à une conférence de Génération identitaire à Lyon en 2012.