Maroc: mauvais usage des pesticides à cause du manque de formation des agriculteurs
Le mauvais usage des pesticides au Maroc vient du manque de formation des agriculteurs
Dans une étude menée dans l’Oriental, quatre chercheurs ont mis en évidence les liens entre les connaissances sur les pesticides chez les agriculteurs et la surutilisation de ces substances.
Ils plaident pour des formations exposant les effets sanitaires et environnementaux de ces produits.
Dans certaines régions du Maroc, la surutilisation des pesticides dans l’agriculture, qui peut être associée à plusieurs autres dysfonctionnements, comme une mauvaise compréhension des pictogrammes des étiquettes sur les pesticides ou même une utilisation insuffisante des équipements de protection, pourrait être le résultat d’un manque de connaissances adéquates chez les agriculteurs, révèle une étude.
Intitulée «Farmer’s toward pesticides use : insight from a field study in Oriental Morocco», elle a été élaborée par quatre chercheurs de l’Université Mohammed I d’Oujda et de l’Office municipal de santé publique de Berkane et publiée dans la revue Environmental Analysis Health and Toxicology du mois de février.
Ainsi, Jamal Benaboud, Mostafa Elachour, Jamal Oujidi et Abdelhafid Chafi ont évalué les connaissances des agriculteurs et à comprendre le modèle d’utilisation des pesticides dans la région de l’Oriental.
À travers un questionnaire standardisé, ils ont interrogé 140 agriculteurs pour évaluer leurs connaissances, leur attitude et leur prise de conscience des pictogrammes utilisés sur les étiquettes des pesticides.
Un manque d’informations sur les pesticides et leur utilisation
Les résultats ont montré que les agriculteurs ont un faible niveau d’éducation, seulement 14% d’entre eux ont été à l’université. Plus, 65% ont eu recours abusivement à des pesticides et 60% n’ont pas respecté l’intervalle entre le traitement et la récolte.
«De nombreux agriculteurs ne connaissaient pas les pictogrammes standards utilisés sur les étiquettes des pesticides, 90% ne reconnaissaient que les os croisés et le signe d’incendie, et 33% ont donné une fausse interprétation ou mal compris ces pictogrammes», ajoutent les chercheurs.
«Ces résultats montrent que les agriculteurs de l’Oriental semblent ignorer le danger des pesticides et manquent d’éducation à la sécurité. Ils ne savent pas comment réagir avec les pictogrammes sur l’étiquette d’un pesticide.»
Les quatre chercheurs affirment que la majorité des agriculteurs de la zone d’étude considèrent les pesticides comme un produit toxique, qui peut avoir des effets néfastes sur l’environnement et la santé humaine.
«Pourtant, cela n’a pas eu un pouvoir positif sur leur utilisation de pesticides contrairement aux attentes. Il est plausible d’affirmer que la plupart des agriculteurs de cette enquête n’accordent pas une grande importance aux facteurs environnementaux et de santé humaine lorsqu’ils appliquent des pesticides», estiment-ils.
Ils ajoutent que «plus de la moitié des agriculteurs de notre étude ne respectent pas l’intervalle pré-récolte, ce qui peut nuire à la santé humaine et peut entraîner un dépassement de la LMR (limite maximale de résidus) dans les denrées alimentaires».
Pour des formations appropriées sur les effets des pesticides
Les quatre chercheurs reconnaissent ainsi que les pictogrammes standards du fabricant ne jouent pas leur rôle comme prévu. «L’étiquetage des pesticides ne donne pas d’informations sensibles sur la manière de manipuler ce produit phytosanitaire», ajoutent-ils.
Ils recommandent ainsi aux autorités de «donner la priorité au développement et à la mise en œuvre de programmes éducatifs de sécurité et de certification des pesticides pour les agriculteurs». «Cette formation doit porter sur les effets sanitaires et environnementaux des pesticides, l’amélioration de la clarté des pictogrammes sur les étiquettes des pesticides et la compréhension du système de réglementation des pesticides au Maroc», suggèrent-ils.
L’étude explique, dans ce sens, qu’une éducation à la sécurité des pesticides est nécessaire pour induire un comportement protecteur chez les agriculteurs et empêcher le résidu de pesticides dans les denrées alimentaires.
La compréhension des pictogrammes sur les étiquettes des pesticides est cruciale pour réduire le risque d’empoisonnement», met-elle en garde.
Les chercheurs à l’Université Mohammed I d’Oujda et à l’Office municipal de santé publique de Berkane estiment aussi que les stratégies d’intervention du ministère de l’Agriculture doivent renforcer le mécanisme d’application des lois actuelles sur les pesticides, la surveillance régulière et le contrôle de la conformité en matière de sécurité des pesticides au niveau des détaillants et des exploitations afin de minimiser l’impact du produit phytosanitaire sur l’environnement et la santé publique.
«Il est également essentiel de former les agriculteurs à des systèmes de culture alternatifs moins dépendants des pesticides et respectueux de l’environnement tout en promouvant des pratiques de gestion intégrée des insectes ravageurs», conclut l’étude.