Washington: un think tank alerte sur une possible intervention militaire de l’Algérie au Sahara
À Washington, un important think tank alerte sur une potentielle intervention militaire de l’Algérie au Sahara
Selon un rapport du think tank International Crisis Group, une intervention militaire de l’Algérie au Sahara pourrait déstabiliser la région. «Il serait erroné de penser que l’Algérie restera neutre. L’Algérie soutient la stratégie militaire d’usure du Polisario», prévient ICG.
«La faible intensité du conflit ne peut pas justifier l’inaction. Le risque d’une escalade militaire progressive, limitée mais tangible, déstabiliserait encore davantage l’Afrique du Nord et le Sahel», soutient ce rapport au contenu explosif, publié sous ce titre: «Il est temps de ré-engager des efforts internationaux au Sahara occidental» (Time for International Re-engagement in Western Sahara).
«Les combats pourraient s’intensifier au moindre incident militaire, tel qu’une ingérence algérienne –par exemple, des transferts d’armes plus importants entre Alger et le Polisario– ou un changement de tactique militaire au sein du mouvement indépendantiste», prévient le think tank, dont le siège se trouve à Washington.
Le think tank International Crisis Group est l’un des centres de réflexion les plus prestigieux au monde. Fondé en 1995, il est présent dans plus de 60 pays et son travail est dédié à résoudre ou à éviter les grands conflits.
Employant plus de 150 experts de renommée, il fait aussi office de lanceur d’alerte, en essayant de prévenir les risques d’escalade et les résolutions de conflits dans le monde. «Il serait erroné de penser que l’Algérie restera neutre. L’Algérie soutient la stratégie militaire d’usure du Polisario.
Bien qu’aucun nouveau transfert d’armes en provenance d’Algérie pouvant améliorer les capacités de l’Armée de libération du peuple sahraoui n’ait été constaté, Alger pourrait envisager ce type de transferts si une flambée de violence tuait un grand nombre de combattants du Polisario, par exemple. Ceci aurait des implications pour toute la région», affirment les auteurs de ce rapport.
«Pour limiter les risques, les partenaires internationaux du Maroc– les Etats-Unis et la France– devraient pousser Rabat à accepter, sans condition préalable, un nouvel envoyé chargé de négocier une désescalade qui pourrait amener les deux parties à négocier une trêve», soutiennent-ils.
Dans ce document, International Crisis Group estime que ces mesures n’auraient d’effet que si les Etats-Unis et le Conseil de sécurité adoptaient une «approche plus directe». «L’administration Biden risque d’être réticente à l’idée de revenir sur la reconnaissance par l’administration Trump de la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental.
Malgré cela, elle pourrait envisager d’autres façons de rassurer le Polisario, par exemple en réaffirmant le soutien de Washington au renouvellement semestriel du mandat de la Minurso», indiquent les auteurs de ce rapport.
Pour éviter de contrarier le Maroc, les résolutions du Conseil de sécurité devraient explicitement faire référence à la nécessité de sécuriser la route d’El Guerguerat, ajoutent-ils.
Selon ce document validé par International Crisis Group, qui cite «des sources pro-Polisario ou non partisanes», Rabat aurait posé des conditions «plus spécifiques et plus strictes» à la nomination d’un Envoyé spécial onusien pour le Sahara.
«Le Maroc aurait refusé qu’il s’agisse d’un ou une diplomate issu d’un pays scandinave (du fait d’une prétendue sympathie qu’ils auraient pour la cause sahraouie), d’Allemagne (car Rabat a découvert avec Köhler qu’il était difficile de contrer Berlin) ou d’un État membre permanent du Conseil de sécurité (pour éviter que des pressions politiques illégitimes puissent être exercées sur les négociations)», annonce le centre de réflexion.
De plus, la solution d’autonomie, défendue par le Maroc et préconisée par l’administration américaine, est une base dont devrait tenir le nouvel envoyé onusien au Sahara.
La même source indique que ces conditions ont «réduit le vivier de candidats potentiels de façon significative». Un ancien ministre des Affaires étrangères qui avait été approché pour le poste, aurait ainsi déclaré: «personne ne veut être associé à un échec diplomatique».
Revenant sur l’intervention des Forces Armées Royales pour rétablir la circulation à El Guerguerat, le rapport indique que «la réponse de l’armée marocaine est restée mesurée; elle n’a pas, jusqu’à présent, cherché à pourchasser les unités ennemies ou à mener une grande opération».
«Si le Maroc nie avoir essuyé des pertes, des sources onusiennes indiquent que deux soldats, au moins, ont perdu la vie au cours de la première semaine de combats», soutiennent les auteurs de ce rapport. Cependant, le Maroc ne déplore aucune perte humaine, depuis que le Polisario a proclamé le retour aux armes suite à la sécurisation définitive du passage d’El Guerguerat.
Par ailleurs, le think tank souligne que «malgré la mobilisation du Polisario, les réactions internationales aux évènements survenus dans le Sahara occidental étaient, majoritairement, favorables au retour rapide du cessez-le-feu, ou s’alignaient sur la position du Maroc».
Par ailleurs, le rapport revient sur la reconnaissance par Washington de la souveraineté du Royaume sur le Sahara, qu’il a qualifiée «d’importante victoire diplomatique» pour Rabat.
«La reconnaissance américaine étant liée à la normalisation diplomatique avec Israël, et bien que des représentants des deux parties appellent à renoncer à cette mesure, l’administration Biden aura probablement du mal à revenir sur la reconnaissance par les Etats-Unis de la souveraineté marocaine sans mettre en péril la relation entre Rabat et Israël», souligne enfin le think tank américain dans ce rapport.