Ahmed Ghayet: cri d’un animal au peuple algérien
AHMED GHAYET: CRI D’UN ANIMAL AU PEUPLE ALGÉRIEN
Aucun politique, aucun intellectuel, aucune figure de votre société n’a fait entendre son désaccord. Aucun n’a rendu audible la moindre protestation contre votre honteuse attitude.
Ô peuple algérien!
Pardonnez à l’animal que je suis de m’adresser à vous par un écrit et non par des onomatopées.
Tout d’abord je voudrais remercier les milliers d’Algériens présents à l’ouverture du CHAN vendredi dernier et qui ont crié à cor et à cri qu’il fallait nous donner des bananes car nous serions un peuple d’animaux.
Sans doute voulaient-ils nous insulter. Et bien c’est raté: la banane est un fruit dont l’immense majorité des gens raffolent et nous, au Maroc, nous avons l’immense chance d’en trouver sur tous les étals de nos commerçants et nous ne nous privons pas d’en déguster.
Votre dépit, à vous Algériens, doit être grand, car il est de notoriété publique que vous ne pouvez vous en procurer que dans vos rêves…
Animaux nous serions!
Très sincèrement, je ne me sens pas injurié -même si, bien sûr, votre objectif était bel et bien de tenter de nous rabaisser.
Tout d’abord, j’aime les animaux et ils sont -tout comme nous- des habitants de notre planète. Sans doute, ne possèdent-ils pas la parole.
Mais vous, qui en bénéficiez, qu’en faites-vous?
Vous insultez, vous criez des propos racistes, vous distillez la haine.
Belle illustration!
Sans doute, leur degré d’évolution serait-il inférieur au nôtre (quoique l’on puisse, en l’occurrence, en douter), mais ils pourraient en bien des domaines nous donner des leçons et nous inspirer des valeurs.
Bref, tout cela pour tourner en dérision la façon honteuse dont vous vous êtes adressés à nous, peuple marocain qui jamais ne vous a fait un quelconque mal, jamais ne se serait permis d’utiliser une tribune sportive de cette envergure pour la transformer en cour de récréation pour enfants mal éduqués.
Ridicule.
Sans doute êtes-vous des supporters de foot, mais alors vous en êtes de bien piètres.
Sans doute n’avez-vous fait que répéter ce que vos dirigeants (encore faudrait-il qu’ils méritent ce nom) vous ont demandé de dire.
Sans doute n’avez-vous pas mesuré la portée de vos paroles.
Il ne faut pas trop vous en demander quand même.
Mais là où les choses deviennent graves -pour vous, pas pour nous- c’est qu’en vous comportant ainsi, vous donnez du grain à moudre à tous ceux qui de par l’Europe professent le racisme.
Vous leur avez fourni un argument de poids, eux qui peuvent dorénavant s’abriter derrière votre comportement, en répétant à l’envie «racistes, nous? Regardez donc! Ils s’insultent entre eux».
«Entre eux», diront-ils car bien sûr pour eux, nous sommes tous les mêmes.
Pour terminer, c’est à l’ensemble du peuple algérien et surtout à ceux qui lui servent d’élite que je destinerai mes propos: aucun politique, aucun intellectuel, aucune figure de votre société n’a fait entendre son désaccord.
Aucun n’a rendu audible la moindre protestation contre votre honteuse attitude.
Personne n’est venu se démarquer de vos insultes sur les réseaux sociaux.
Que faut-il en déduire?
Que tous les Algériens partagent la même opinion.
Quoique le racisme ne soit pas une opinion, mais bel et bien un crime.
Ou bien que vous vous comportez en troupeau.
Où sont donc les animaux?
La réponse est dans la question.