vendredi, novembre 22, 2024
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Maroc: la France blâmée pour le traitement humiliant des demandeurs de visa

MAROC : LA FRANCE BLÂMÉE POUR LE «TRAITEMENT HUMILIANT» DES DEMANDEURS DE VISA

Cette semaine, dix associations marocaines ont adressé une plainte à la France concernant les visas. Elles ont appelé les autorités françaises en particulier et les autorités européennes en général à annuler des mesures qu’elles considèrent comme « humiliantes », « honteuses », « discriminatoires » et « punitives », qui ont un impact négatif sur les demandeurs marocains de visas.




Malgré les assurances d’une « récupération de la normalité », les Marocains continuent de faire face à de nombreux refus de leurs demandes de visas auprès des représentations diplomatiques européennes, en particulier celles de la France.

Ce constat amer a été soulevé cette semaine par dix organisations de la société civile marocaine, parmi lesquelles l’Institut Prometheus pour la démocratie et les droits humains, la Ligue marocaine pour la défense des droits humains (LMDH), Adala, le Forum marocain des jeunes journalistes (FMJJ) et l’Instance nationale de la jeunesse et de la démocratie (INJD), qui regroupe 16 jeunesses des partis politiques marocains.

Dans une lettre ouverte consultée par « Le Petit Journal Marocain », intitulée « La politique des visas : Discrimination et traitement humiliant des demandeurs de visas marocains », les organisations s’attaquent particulièrement à la France et présentent un constat « accablant ».

La lettre mentionne « le recours à des opérateurs privés qui se substituent à l’administration française, qui ne sont pas rémunérés par l’Etat français, mais bien par les postulants eux-mêmes », « l’inflation procédurale et la multiplication des catégories et sous-catégories organisées en cas, qui plombe les procédures de demande de visas en les rendant plus caduques, opaques et perméables à l’arnaque des services interposés pour le traitement des demandes ».

Elle critique le fait que « le paiement des frais de dossiers s’effectue lors du dépôt de la demande, au lieu d’être dus uniquement en cas de délivrance du visa », les « délais d’instruction qui restent extrêmement variables » et les délais d’attente « interminables ».




Le collectif d’associations marocaines dénonce également les refus standards de visas non suffisamment justifiés, l’absence de procédure de contestation contre ces refus et les vérifications répétées et excessives des informations fournies par les demandeurs, qui constituent une humiliation supplémentaire pour la plupart des personnes qui se soumettent à ce processus. 

Dans ce contexte, les associations considèrent que le droit à la libre circulation est pris en otage et décrivent les mesures comme régressives et punitives, portant atteinte à un droit humain fondamental.

« L’instance prévoyait de publier une position sur ce problème, car de nombreux citoyens marocains, en particulier les jeunes, les militants politiques et les représentants d’associations, ont été touchés et ont vu leurs demandes refusées sans justification. Il faut également souligner ce qui est advenu des documents déposés par les Marocains et le processus de leur destruction, d’autant plus qu’ils contiennent des informations personnelles », a déclaré Jamal Touissi, président de l’Instance nationale de la jeunesse et de la démocratie (INJD).

Il a rappelé que la Commission nationale de contrôle de protection des données à caractère personnel (CNDP) a déjà épinglé TLScontact, le prestataire de collecte de demandes de visa pour le compte des ambassades de plusieurs pays au Maroc.

«Pour nous, la question des frais de visa non remboursables pose aussi un problème. Si les bureaux de TLS sont déjà informés des quotas de visas à accorder et ceux à rejeter, pourquoi les citoyens doivent payer ? Si un visa est refusé car le dossier est incomplet, nous pouvons comprendre. Mais si ces dossiers ne sont rejetés que parce que le quota soit atteint, nous ne comprenons pas pourquoi les Marocains doivent être pénalisés pour cela.»
Jamal Touissi





Les organisations non gouvernementales soutiennent dans leur lettre que l’externalisation du traitement des demandes de visas n’assure pas la protection adéquate et la sécurité des données personnelles, en particulier des identificateurs biométriques.

Le président de l’Instance nationale de la jeunesse et de la démocratie souligne que le droit de circuler est un droit universel qui ne doit pas être soumis à des enjeux politiques.

Jamal Touissi ajoute que les refus de visas pour des citoyens marocains et des militants sont considérés comme une forme de vengeance envers le gouvernement marocain en raison du froid diplomatique avec la France, et cela est fermement dénoncé.

Des centaines de demandes de soutien ont été reçues par Adil Tchikito, président de la Ligue marocaine des droits humains (LMDH), provenant d’étudiants, de personnes en besoin de soins à l’étranger et de travailleurs.

Il regrette que certaines personnes aient été empêchées de voyager pour des raisons futiles.

Adil Tchikito souligne que la Ligue marocaine des droits humains a entamé des démarches envers plusieurs instances, telles que le rapporteur spécial des Nations unies en charge du droit de circulation, le Conseil des droits de l’Homme et l’ambassadeur de l’Union européenne au Maroc, sans recevoir de réponse à ce jour.

Il a également travaillé en étroite collaboration avec d’autres organisations, notamment la Coalition marocaine des instances des droits de l’Homme (composée d’environ 20 ONG) qui a reçu environ 300 demandes de différentes catégories.




Adil Tchikito, président de la Ligue marocaine des droits humains, a exprimé son regret quant à la réponse obtenue suite à la dénonciation de comportements adoptés par les ambassades de l’Union européenne contraires aux pactes internationaux et à la Déclaration universelle des droits de l’homme.

En effet, la Coalition marocaine des instances des droits de l’homme, comprenant plusieurs ONG, a contacté l’ambassadrice de l’UE pour dénoncer ces comportements, notamment la restriction de la liberté de circulation.

La réponse perçue était condescendante et défendait implicitement les pays de l’Union européenne en insistant sur leur souveraineté sur leurs frontières.

Selon Adil Tchikito, il ne s’agit pas d’une question de souveraineté, mais plutôt de respecter les droits, surtout dans les cas urgents.

«Jusqu’à maintenant, il n’y a pas de changement. Il y a une déclaration de la ministre française des Affaires étrangères depuis Rabat, qui a promis que les choses vont revenir à la normale ainsi que le communiqué de l’ambassade de France, qui confirme qu’elle va essayer de serrer la vis sur les intermédiaires des visas. Mais sur le plan pratique, ces décisions n’ont eu aucun effet. Nous espérons voir le changement sur le terrain.»
Adil Tchikito

Dans leur lettre, les ONG appellent les autorités françaises et les pays européens à abandonner ces mesures déshonorantes. Elles critiquent un climat dégradant qui instaure des mesures discriminatoires de pression et des mesures de punition en échange de réadmissions forcées.

Les ONG invitent toutes les forces démocratiques et les militants pour les droits humains au Maroc, en France, en Europe et partout dans le monde à se rassembler pour dénoncer cette politique.