Cérémonie d’installation du gouvernement provisoire kabyle
LE MOUVEMENT D’AUTONOMIE KABYLE SE MOBILISE
Le gouvernement provisoire kabyle sera installé à Paris le samedi 15 avril, en signe de la lutte soutenue menée par le Mouvement pour l’Autonomie de la Kabylie (MAK) pour recouvrer pleinement ses droits et libertés.
Cette cérémonie marque une étape importante dans l’histoire de ce mouvement.
Le Mouvement d’autonomie kabyle est aujourd’hui l’incarnation d’une lutte qui dure depuis plus de quatre décennies.
Cette lutte est menée par une communauté qui souhaite prendre en main son destin dans un pays qui est répressif, oppressif et qui n’a pas réussi à édifier un projet de société démocratique, solidaire, fondé sur l’État de droit et les principes d’équité et de justice.
La Kabylie n’est pas simplement une région, c’est l’histoire d’un territoire que les Kabyles appellent traditionnellement « Tamurt » (pays).
Cette lutte est identitaire, menée par un peuple kabyle de plus de 12 millions de personnes sur un territoire d’environ 40 000 km².
Il est indéniable que ce peuple doit être qualifié de « peuple » en raison de facteurs objectifs tels que l’histoire, l’ethnie, la langue et la culture, ainsi que d’un désir collectif de vivre ensemble, d’un fort sentiment d’appartenance et d’une vision commune pour l’avenir.
Ce peuple kabyle aspire à son émancipation, à son autonomie et à son autodétermination, estimant que les prérequis nécessaires sont légitimes en vertu des principes énoncés dans la Charte des Nations Unies et le droit international. Le peuple kabyle aspire à la séparation d’avec l’Algérie actuelle.
Il s’agit d’un peuple autochtone dont l’existence est niée et même rejetée par le pouvoir actuel. L’histoire de la région témoigne de cette situation, qui a été marquée par une revendication identitaire depuis le milieu du siècle précédent.
Cette revendication s’est manifestée en 1949 avec la crise dite « berbériste », en 1963 avec le soulèvement du Front des forces socialistes (FFS) de Hocine Aït Ahmed, en 1980 avec le « printemps berbère », et en avril 2001 avec le « printemps noir » qui a entraîné la mort de plus de 120 jeunes.
Pendant trois ans, le territoire kabyle a fonctionné de manière quasi-autonome sur la base d’une organisation sociale et politique traditionnelle kabyle appelée les « Archs ».
C’est en juin 2001 que le Mouvement pour l’Autonomie de la Kabylie a été créé, portant depuis lors le projet d’autonomie régionale et évoluant vers l’autodétermination et l’indépendance.
Son président, Ferhat Mehenni, est un militant historique depuis des décennies et co-fondateur de la Ligue algérienne des droits de l’homme – la plus représentative dans ce domaine et frappée de dissolution en septembre dernier.
En plus d’être un responsable politique, il est également écrivain, poète-chanteur kabyle, et a remporté le prix Gusi de la paix en 2013.
La Kabylie et les militants de la mouvance autonomiste qui en font partie ont été constamment soumis à la répression, sans répit.
Les autorités algériennes ont durci les mesures et même adopté des discours racistes anti-kabyles.
Des députés et membres du gouvernement s’illustrent en toute impunité dans cette démarche, à l’instar de la parlementaire Naima Salhi, présidente du Parti de l’équité et de la proclamation, qui appelle à exterminer les Kabyles en les qualifiant de « juifs de la pire espèce ».
Les islamistes tiennent un discours tout aussi éradicateur, avec Mohamed Larbi Zitout, chef du parti Rachad, qui appelle à « prendre les armes contre les séparatistes du Mouvement pour l’Autonomie de la Kabylie ».
La dissidence kabyle est diabolisée et criminalisée par les autorités.
Les forces de sécurité fabriquent une affaire en saisissant des armes et des explosifs destinés à des actes criminels et terroristes, attribués à un certain « H. Nourredine », présenté comme un ancien membre du Mouvement pour l’Autonomie de la Kabylie.
Le Mouvement pour l’Autonomie de la Kabylie réagit vigoureusement et défie le gouvernement algérien de fournir des preuves pour soutenir ces accusations.
Depuis sa création il y a vingt ans, le mouvement revendique une action politique et pacifique pour « le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ».
La télévision nationale est obligée de diffuser une interview de l’ex-membre présumé du Mouvement pour l’Autonomie de la Kabylie, qui donne une version invraisemblable : il aurait trouvé les armes lors d’une promenade et avait l’intention de les revendre.
Cependant, les enquêteurs découvrent que ce dernier est un trafiquant et un récidiviste.
Le 11 mai 2021, la loi régissant le scrutin pour l’autodétermination de la Kabylie est promulguée sur le site officiel du journal de l’ANAVAD (Gouvernement provisoire kabyle; le MAK a fusionné avec le Gouvernement provisoire kabyle (GPK) pour former le MAK-ANAVAD).
Une semaine plus tard, le Haut Conseil de Sécurité (HCS), présidé par Abdelmajid Tebboune, classe le Mouvement pour l’Autonomie de la Kabylie sur la « liste des organisations terroristes ».
Ferhat Mehenni est brièvement placé en garde à vue à Paris, mais Alger ne parvient pas à l’extrader en utilisant la convention d’extradition bilatérale avec la France.
Le 24 mai 2021, Ferhat Mehenni saisit le Secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, pour dénoncer la classification du Mouvement pacifiste pour l’Autonomie de la Kabylie en tant que mouvement terroriste.
Il rappelle que l’autodétermination est une action politique et invite la Commission des droits de l’homme de l’ONU à examiner qui, du Mouvement pour l’Autonomie de la Kabylie ou du pouvoir algérien, devrait être mis au ban de la communauté internationale.
Le 10 juin 2021, le Code pénal algérien est modifié avec une nouvelle définition de l’acte terroriste, qui conduit à l’emprisonnement de centaines de militants du Mouvement pour l’Autonomie de la Kabylie.
La Kabylie boycotte l’élection présidentielle de décembre 2019 ainsi que le référendum constitutionnel, et la justice condamne Ferhat Mehenni et 49 autres dirigeants du Mouvement pour l’Autonomie de la Kabylie à mort.
Le Mouvement pour l’Autonomie de la Kabylie, mouvement pacifiste kabyle, a été qualifié d’organisation terroriste par le Haut Conseil de Sécurité (HCS) en mai 2021, mais cette classification a été rejetée par le rapport du Département d’Etat américain.
Plusieurs groupes de défense des droits humains tels qu’Amnesty International et Human Rights Watch ont également exprimé leur soutien au mouvement kabyle et au Hirak du 22 février 2019.
Le président du Mouvement pour l’Autonomie de la Kabylie a saisi la IVème Commission de l’ONU pour demander l’examen de la situation en Kabylie au titre de la décolonisation, ce qui pose une contradiction pour le régime algérien qui défend l’autodétermination du mouvement séparatiste du « Polisario » tout en s’opposant à celle du peuple kabyle.
La communauté kabyle, quant à elle, revendique ses titres de légitimité en tant que communauté historique, culturelle et identitaire, et considère la lutte pour l’autodétermination comme une juste cause.
L’Algérie se trouve confrontée à une contradiction : comment justifier la défense de l’autodétermination du mouvement séparatiste du « Polisario », qui compte environ 40 000 réfugiés dans les camps de Tindouf en territoire algérien, tout en s’opposant à l’autodétermination du peuple kabyle de plus de 12 millions de personnes ?
Dans le premier cas, il s’agit d’une entité factice où seulement 20 % des habitants sont des Sahraouis, tandis que dans le second, il s’agit d’une communauté historique, culturelle et identitaire qui a des titres de légitimité, à savoir des arguments, des justifications, des preuves ou des droits légaux qui donnent une base solide à leurs revendications et à leurs positions. la communauté kabyle a des raisons valables et légitimes de revendiquer son droit à l’autodétermination, notamment en raison de son histoire, de sa culture et de son identité distinctes.
N’oublions pas que la définition de peuple, c’est un « ensemble d’êtres humains vivant en société, formant une communauté culturelle, et ayant en partie une origine commune. »