Des violations des droits de marocains en Algérie
Des violations des droits de marocains en Algérie
Depuis près de trois décennies, le poste-frontière de Zouj Beghal, situé entre le Maroc et l’Algérie, demeure essentiellement fermé, ne s’ouvrant que lors de rares occasions pour des opérations spécifiques telles que les transferts de prisonniers, de migrants clandestins ou de corps de personnes décédées. Ce passage, autrefois un lieu de commerce et de transit, a vu son rôle drastiquement réduit, notamment en raison des tensions diplomatiques entre les deux pays. Cette fermeture complique le quotidien de nombreuses familles marocaines, qui, lorsqu’elles doivent récupérer les corps de leurs proches décédés en Algérie, se heurtent à des procédures administratives longues et éprouvantes.
Dans certains cas, le rapatriement des dépouilles peut prendre plus de cinq mois, une attente insoutenable pour des familles en deuil, déjà affectées par la douleur de la perte et confrontées à un processus bureaucratique complexe et inhumain. Cette situation alimente un sentiment d’angoisse et de désespoir chez les familles, qui se retrouvent dans l’incapacité de faire leur deuil dans des délais raisonnables.
Récemment, l’Association marocaine d’aide aux migrants en situation difficile, basée à Oujda, a révélé une nouvelle violation des droits des migrants marocains détenus en Algérie. D’après un rapport publié par cette association, les autorités algériennes ont procédé, le lundi 16 septembre 2024, à la libération de 52 jeunes Marocains après plusieurs années d’incarcération injustifiée. Cependant, bien que cette libération constitue un soulagement pour les familles concernées, le sort de plus de 400 autres Marocains reste incertain. En effet, ces derniers sont toujours en détention dans des conditions précaires, ajoutant à la gravité de la situation, six corps de migrants décédés en détention n’ont toujours pas été remis à leurs proches.
Ces migrants marocains, pour la plupart en quête d’une vie meilleure ou tentant de rejoindre l’Europe via l’Algérie, se retrouvent souvent piégés. Ils sont arrêtés à la frontière ou dans le territoire algérien, souvent sans motifs valables, et sont maintenus en détention prolongée sans jugement, dans des conditions inhumaines. Le rapport de l’association met en lumière le calvaire de certains détenus, qui ont passé plus de trois ans derrière les barreaux sans procès, ni perspective de libération. Parmi ceux qui ont récemment été relâchés, beaucoup ont partagé des témoignages glaçants sur les mauvais traitements subis en prison, révélant la réalité sordide des conditions carcérales en Algérie.
L’Association marocaine d’aide aux migrants suit de près cette affaire, maintenant des contacts réguliers avec les autorités marocaines et algériennes, ainsi qu’avec des organisations internationales comme la Croix-Rouge. Cependant, malgré les efforts diplomatiques et humanitaires, la résolution de cette crise se heurte à des obstacles majeurs, notamment depuis la rupture des relations diplomatiques entre le Maroc et l’Algérie, causée par l’Algérie, en 2021. Cette rupture unilatérale a aggravé les tensions, rendant toute coopération difficile, voire impossible, et compromettant les perspectives d’amélioration de la situation des détenus marocains en Algérie.
Pour les familles des prisonniers et des disparus, l’attente devient insupportable. Chaque jour, l’espoir de revoir leurs proches vivants s’amenuise. Ce désespoir est accentué par le fait que plusieurs corps de migrants décédés restent bloqués en Algérie, dans l’attente de procédures de rapatriement complexes et fastidieuses. Ces familles, déjà endeuillées, doivent faire face à une bureaucratie étouffante et à l’absence de réponses claires de la part des autorités des deux pays.
Parallèlement à cette crise, l’association dénonce également l’exploitation dont sont victimes ces migrants de la part de réseaux mafieux bien organisés. Ces réseaux criminels profitent de la vulnérabilité des migrants, ainsi que de la détresse psychologique et sociale de leurs familles, pour les extorquer. Trafiquants et intermédiaires agissent en toute impunité, promettant des solutions rapides en échange de sommes d’argent importantes, plongeant ainsi ces familles dans un cercle vicieux de dépendance financière et de désespoir. L’association, malgré ses moyens limités, s’efforce de poursuivre ces criminels devant la justice et de défendre les victimes de ces réseaux.
Toutefois, malgré son engagement inébranlable, l’association se trouve limitée par des ressources financières et logistiques insuffisantes. La gestion de cette crise humanitaire complexe dépasse ses capacités, d’autant plus que la situation est exacerbée par l’absence de dialogue entre les gouvernements algérien et marocain. C’est pourquoi l’association en appelle aux deux États pour renforcer leurs efforts en vue de trouver une solution durable à cette crise. Elle exhorte également les autorités marocaines à mieux protéger leurs ressortissants, souvent naïvement piégés par ces réseaux criminels lorsqu’ils tentent de traverser l’Algérie dans l’espoir de rejoindre l’Europe.
Cette situation tragique met en lumière l’urgente nécessité de renforcer la coopération régionale pour assurer la protection des droits fondamentaux des migrants dans cette région du monde. La gestion de cette crise ne peut se limiter à des interventions ponctuelles ou à des libérations symboliques : elle nécessite une approche globale et coordonnée, intégrant les aspects humanitaires, juridiques et diplomatiques.
Ainsi, l’Algérie, qui devait être un simple territoire de transit pour ces migrants en route vers une nouvelle vie, devient malheureusement pour beaucoup un piège mortel. Entre 4 planches ou entre 4 murs… Le pays se transforme pour certains en un véritable cimetière ou en une prison à ciel ouvert, où des vies sont brisées, oubliées de l’opinion publique. Une tragédie silencieuse que les discours officiels peinent à dissimuler, mais dont les échos douloureux continuent de résonner des deux côtés de la frontière.
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