Eau potable : retard du gouvernement dans la réalisation de projets
Eau potable : retard du gouvernement dans la réalisation de projets
Maroc : des retards du gouvernement dans la gestion des projets programmés pour assurer l’approvisionnement en eau potable
Dans son rapport annuel 2023-2024, la Cour des comptes dresse un bilan particulièrement sévère concernant la gestion des projets d’approvisionnement en eau potable au Maroc, un secteur confronté à de nombreux défis en raison de la pénurie croissante de ressources en eau. Ce phénomène est aggravé par la succession de sécheresses successives et la pression démographique, qui entraîne une augmentation constante de la demande d’eau. Dans ce contexte, la Cour des comptes, présidée par Zineb El Adaoui, a observé de nombreux retards et dysfonctionnements dans la mise en œuvre des projets destinés à assurer un approvisionnement en eau fiable pour la population.
Retards dans les projets stratégiques
Le rapport de la Cour des comptes souligne plusieurs projets d’importance stratégique dans le cadre de la stratégie nationale de l’eau (2009-2030), mais qui accusent des retards significatifs dans leur réalisation. Parmi ces projets, on trouve le transfert d’eau du bassin du Sebou vers le barrage de Sidi Mohamed Ben Abdallah, dans le bassin du Bouregreg, ainsi que le raccordement de ce dernier au barrage d’Al-Massira, dans le bassin d’Oum Errabia. Ce projet vise à renforcer l’approvisionnement en eau potable de la région de Marrakech, mais n’a pas été réalisé dans les délais initialement prévus, aggravant ainsi les tensions liées à l’approvisionnement en eau potable dans cette région stratégique.
Un autre projet de transfert d’eau a également été mis en lumière dans le rapport : il s’agit de l’extension du réseau d’approvisionnement en eau potable à travers le pays, qui nécessite la mise en place de nouvelles infrastructures pour améliorer la distribution d’eau dans les régions les plus touchées par la pénurie d’eau. Le retard dans ces projets compromet les objectifs à long terme de la stratégie nationale, qui visait à garantir un accès équitable et durable à l’eau pour tous les citoyens.
Barrages en construction
La construction de barrages est également l’un des volets majeurs de la stratégie marocaine pour faire face aux défis de la gestion des ressources en eau. Cependant, plusieurs barrages essentiels accusent des retards de plusieurs années par rapport au calendrier prévu. Parmi les projets les plus retardés figurent :
– Le barrage de Sidi Abbou dans la province de Taounate, qui accuse un retard de 8 ans.
– Le barrage de Kheng Grou dans la province de Figuig, avec un retard de 7 ans.
– Les barrages de Taghzirt dans la province de Béni Mellal et de Boulaouane dans la province de Chichaoua, avec des retards de 5 ans.
– Le barrage de Beni Azimane dans la province de Driouch, avec un retard de 4 ans.
– Le barrage d’Ait Ziat dans la province d’Al Haouz, avec un retard de 1 an.
Ces retards dans la construction des barrages ont des conséquences directes sur la gestion des ressources en eau à l’échelle nationale. En effet, ces infrastructures sont cruciales pour stocker l’eau, réguler son flux et la distribuer de manière efficiente. La Cour des comptes déplore également le manque de coordination entre les différents acteurs impliqués dans la gestion de ces projets, ce qui complique leur mise en œuvre dans les délais impartis.
Projets de dessalement
En outre, la Cour a noté le non-respect des délais pour les projets de dessalement de l’eau de mer, un axe stratégique dans la diversification des sources d’approvisionnement en eau, particulièrement pour les zones côtières à forte demande. Le projet de station de dessalement à Casablanca, censé démarrer en 2010, a pris un retard considérable, avec l’appel à manifestation d’intérêt qui n’a été lancé qu’en mars 2022. De même, le projet de dessalement à Saïdia, prévu pour 2015, a finalement été lancé en 2022. Ces délais de mise en œuvre tardive viennent alourdir les tensions liées à la disponibilité de l’eau, en particulier dans les zones à forte densité de population comme Casablanca.
Difficultés d’exécution des projets
Le rapport de la Cour des comptes met également en évidence les difficultés d’exécution de nombreux projets d’infrastructures d’approvisionnement en eau potable. Ces projets, d’un coût total estimé à 3,9 milliards de dirhams jusqu’à juillet 2022, ont rencontré plusieurs obstacles :
– Les conséquences de la pandémie de Covid-19, qui ont entraîné des interruptions et des retards dans la mise en œuvre des projets, affectant ainsi le calendrier de réalisation des infrastructures.
– L’augmentation des prix des matières premières, qui a engendré des coûts imprévus, affectant le budget initialement alloué à ces projets.
– Des dommages sur les infrastructures en construction, en raison des travaux de construction de routes et de pistes adjacentes non coordonnés, qui ont affecté la qualité et le délai des travaux.
Recommandations de la Cour des comptes
Face à cette situation préoccupante, la Cour des comptes formule plusieurs recommandations pour remédier aux retards et améliorer la gestion des projets liés à l’approvisionnement en eau :
– Accélérer la mise en œuvre des projets stratégiques et structurants, notamment en matière de barrages et de dessalement, afin d’assurer une gestion plus efficace des ressources en eau.
– Renforcer la coordination entre les différentes entités et acteurs impliqués dans la gestion des projets d’eau, notamment les ministères, les agences publiques et les entreprises privées.
– Mettre en place des mécanismes d’évaluation et de suivi rigoureux, afin d’assurer une meilleure gestion et transparence dans l’exécution des projets.
– Élaborer des plans de gestion de la pénurie d’eau au niveau des régions les plus touchées, en s’assurant que la priorité soit donnée à l’approvisionnement en eau potable pour la population.
– Affecter les réserves d’eau disponibles aux programmes d’irrigation agricoles, en coordination avec le ministère de l’Agriculture, pour préserver les ressources en eau et garantir une gestion optimale.
En bref…
En bref, la Cour des comptes appelle à une mobilisation accrue et une gestion plus rigoureuse des projets d’approvisionnement en eau pour faire face à la crise croissante de la pénurie d’eau au Maroc. Le retard dans la réalisation des projets et les défis logistiques actuels soulignent la nécessité d’une réponse rapide, coordonnée et efficace pour garantir la sécurité en eau à long terme, tout en préservant l’accès des populations à cette ressource essentielle.