Secteur portuaire : l’Espagne n’arrive pas à rivaliser avec le Maroc
Secteur portuaire : l’Espagne n’arrive pas à rivaliser avec le Maroc
L’Espagne commence à regarder avec une certaine inquiétude la progression du Maroc dans le secteur portuaire, particulièrement avec l’ascension fulgurante du port de Tanger Med, dans le TOP 20 mondial, qui devient un concurrent majeur pour les infrastructures portuaires espagnoles. Tanger Med, véritable titan logistique, est désormais un acteur clé dans le transport maritime, et ses performances dans le domaine du transport de conteneurs font de lui un rival redoutable pour les ports espagnols, notamment ceux d’Algésiras et de Valence.
Le constat alarmant est venu de l’organisme public Puertos del Estado, l’autorité en charge de la gestion et du développement des ports espagnols. Son président, Álvaro Rodríguez Dapena, a exprimé ses préoccupations lors d’une visite à Melilla, où il a affirmé que les ports marocains, avec Tanger Med en tête, représentent aujourd’hui des « rivaux très puissants » pour les ports espagnols. En effet, Tanger Med a atteint un volume de près de neuf millions de conteneurs EVP (équivalent vingt pieds) traités par an, un chiffre impressionnant qui surpasse largement ceux du port d’Algésiras et du port de Valence, ces ports espagnols peinent à atteindre, ensemble, un volume de cinq millions de conteneurs EVP traités par an.
Le président de Puertos del Estado a aussi pointé du doigt l’un des principaux facteurs qui expliquent cette montée en puissance de Tanger Med : l’ « avantage compétitif » que le Maroc possède, notamment en termes de coûts. Ce dernier, bénéficiant de coûts opérationnels plus faibles, attire de plus en plus d’armateurs et devient un point de passage incontournable pour les flux de marchandises en Méditerranée. En réponse, l’Espagne, membre de l’Union européenne, mise davantage sur la qualité de ses services et ses infrastructures modernes pour se différencier de ses concurrents, soulignant sa position stratégique dans les échanges internationaux, notamment grâce à sa proximité avec les marchés européens.
Malgré cette compétitivité accrue, Puertos del Estado insiste sur le fait que cette situation pourrait également offrir des opportunités de coopération entre les deux pays. Selon Dapena, les ports marocains et espagnols ne sont pas forcément en concurrence directe mais peuvent fonctionner en complémentarité. Il a mis en avant l’importance du secteur du transport de véhicules roulants, également appelé « ro-ro » (roll-on/roll-off), dans cette complémentarité. En effet, l’essor de Tanger Med génère un « trafic complémentaire » plutôt qu’une concurrence directe. Ce secteur en particulier connaît une croissance continue, avec une augmentation annuelle d’environ six à sept pour cent depuis plus d’une décennie. Ce phénomène touche à la fois le transport de camions complets et de semi-remorques, une catégorie de fret qui concerne particulièrement les exportations vers l’Afrique et l’Asie.
Cette augmentation de la capacité de traitement des conteneurs à Tanger Med et la hausse des volumes de transport « ro-ro » a des répercussions positives pour l’ensemble de la région méditerranéenne. Les deux pays, selon Dapena, peuvent en profiter collectivement. Par exemple, le port d’Algésiras bénéficie indirectement de la croissance du trafic à Tanger Med, puisque certains conteneurs destinés à l’Europe ou à d’autres régions du monde passent par les deux ports en fonction de la destination finale, optimisant ainsi les flux logistiques dans la région.
En bref…
Bien que Tanger Med devienne un concurrent de plus en plus redoutable pour les ports espagnols, en particulier dans le domaine du transport de conteneurs, il semble aussi offrir des opportunités de coopération entre les deux pays. Si les ports espagnols restent derrière en termes de volumes traités, ils continuent de capitaliser sur la qualité de leurs infrastructures et la compétitivité de leurs services, alors que les ports marocains, à l’image de Tanger Med, tirent parti de leurs coûts plus faibles pour se positionner comme des hubs logistiques incontournables. Le secteur portuaire méditerranéen pourrait donc voir émerger un modèle de complémentarité où chaque port joue un rôle clé dans le réseau global.