(Vidéo) Carte du Maroc : erreur ou provocation de l’Espagne ?
(Vidéo) Carte du Maroc : erreur ou provocation de l’Espagne ?
L’apparition de Pedro Sánchez Pérez-Castejón, le président du gouvernement espagnol, devant une carte du Maroc amputée de son Sahara atlantique lors de son message de Noël a provoqué une onde de choc et d’indignation au Maroc, amplifiée par le contexte diplomatique entre les deux pays.
Le 25 décembre 2023, dans son traditionnel discours de Noël adressé à la communauté chrétienne, le Président du gouvernement d’Espagne Pedro Sánchez a salué l’engagement des plus de 15 000 soldats espagnols en mission à l’étranger, affirmant leur rôle central dans la promotion de la paix et de la sécurité à l’échelle mondiale. Mais c’est l’apparition d’une carte du Maroc sans la représentation de son Sahara atlantique qui a focalisé l’attention, suscitant une réaction immédiate et virulente de la part du gouvernement marocain et des citoyens du Royaume.
Ce geste survient dans un contexte où l’Espagne, après un changement de position important en 2022, a officiellement soutenu l’initiative marocaine d’autonomie pour le Sahara occidental comme étant la solution la plus « sérieuse, réaliste et crédible » pour résoudre le conflit (artificiel) territorial. Lors de la visite du roi Mohammed VI à Madrid en avril 2022, le gouvernement espagnol avait exprimé son clair soutien à cette initiative, marquant un tournant historique dans les relations entre les deux pays. Pedro Sánchez avait alors souligné que l’Espagne considérait cette initiative comme la (seule) base pour parvenir à une solution politique. Pourtant, plus de deux ans après ce soutien explicite, l’utilisation de cette carte omettant le Sahara atlantique remet en question la constance et la sincérité de la position espagnole, d’autant plus que Madrid réaffirme régulièrement son désir de renforcer ses liens diplomatiques et économiques avec le Maroc.
La polémique est d’autant plus sensible que le Sahara occidental est une question d’importance capitale pour le Maroc, ce territoire faisant intégralement partie de son royaume. L’intégrité territoriale du Maroc est un principe fondamental sur lequel le Royaume ne transige pas. Dans ce contexte, la représentation cartographique erronée dans le discours de Noël a été perçue par le gouvernement marocain comme une provocation, un geste symbolique mais significatif qui remet en cause les fondements de la relation bilatérale, en dépit des déclarations officielles de soutien. Le gouvernement marocain a rapidement exprimé son mécontentement, dénonçant l’attitude de l’Espagne, estimant que ce type de geste va à l’encontre de l’esprit de coopération et de réconciliation affiché par Madrid ces dernières années.
De plus, la question des tensions potentielles concernant la gestion du Sahara occidental par le Maroc n’est pas anodine. Des rapports récents font état de préoccupations croissantes en Espagne sur la gestion par le Maroc de l’espace aérien de son Sahara occidental. Selon certaines informations, Rabat aurait pris des mesures « unilatérales » pour étendre son contrôle sur cet espace, ce qui pourrait entraîner des frictions avec Madrid et d’autres acteurs internationaux. Bien que ces questions restent en grande partie sous silence, elles révèlent un terrain sensible sur lequel l’Espagne pourrait être perçue comme jouant un double jeu, à la fois partenaire et critique du Maroc dans cette région.
Pour le Maroc, l’offense dépasse la simple question de la carte. Elle touche à un symbole de souveraineté et d’unité nationale. Les provinces du sur du de Maroc sont au cœur de l’identité politique et diplomatique du pays, et tout geste ou déclaration qui semble remettre en cause sa souveraineté sur cette région est perçu comme un affront. Le gouvernement marocain, de son côté, rappelle fréquemment que toute solution politique au conflit artificiel entretenu par l’Algérie autour du Sahara occidental doit respecter son intégrité territoriale, conformément aux résolutions des Nations Unies et à la position du Conseil de sécurité.
Cet incident intervient dans un contexte où les relations entre le Maroc et l’Espagne sont par ailleurs marquées par un climat de coopération renforcée depuis 2022, notamment dans les domaines de la sécurité, du commerce et de la gestion des flux migratoires. La visite royale à Madrid et l’accord bilatéral signé à cette occasion avaient donné un nouveau souffle aux relations entre les deux pays. Toutefois, cet épisode rappelle que la question du Sahara marocain reste une ligne de fracture potentielle dans cette relation, capable de raviver des tensions en dépit des efforts pour consolider un partenariat stratégique.
Le geste de Pedro Sánchez, même s’il semble être un incident (erreur ou provocation) isolé, met en lumière la fragilité de cet équilibre diplomatique et la sensibilité du Maroc à toute remise en question de sa souveraineté sur son Sahara atlantique. Pour certains observateurs, il soulève la question de la cohérence de la politique espagnole à l’égard du Maroc, un pays clé dans la géopolitique régionale, et invite à une réévaluation des priorités de Madrid dans ses relations avec son voisin du sud.