Centenaire de la Mosquée de Paris: hold-up franco-algérien
CENTENAIRE DE LA MOSQUÉE DE PARIS: HOLD-UP FRANCO-ALGÉRIEN
Pour célébrer les cent ans de la Grande Mosquée de Paris, la France et … l’Algérie organisent une cérémonie ce mercredi 19 octobre. Cette commémoration se fera en l’absence de toute participation marocaine, alors que le Royaume du Maroc est à l’origine même de la création de cet édifice construit en 1922 dans le 5ème arrondissement de Paris.
La cérémonie est organisée à l’initiative du recteur de la Grande mosquée de Paris, le franco-algérien, Chems-eddine Hafiz, pour célébrer les 100 ans de ce lieu emblématique, et à laquelle participera le président de la République française, Emmanuel Macron.
Tout prête à croire que ce dernier n’est apparemment pas au courant de l’histoire de ce lieu, ou ferme plutôt les yeux, pour obtenir à tout prix la sympathie de l’Algérie, fournisseur indispensable de gaz pour l’hexagone en ces temps durs de guerre russo-ukrainienne.
Même la presse française s’en étonne, et évoque tout bonnement une « expropriation morale » flagrante, ne manquant pas de revenir sur l’histoire de la construction même de ce lieu emblématique, dont les acteurs originels, à savoir les Marocains, ont totalement été écartés de cette cérémonie.
Un oubli de l’histoire ou un autre geste provocateur de la France ?
On penche plus pour le deuxième choix, puisque le premier peut s’avérer encore plus grave. En tout cas, nous tenterons dans cet article à rappeler à nos voisins européens l’histoire de cet édifice, dates à l’appui.
En 1922, le Sultan Moulay Youssef ordonna le lancement des travaux de construction de la mosquée de Paris, dont la propriété revient à la Société des Habous et des lieux saints, fondée en 1917 au Palais Royal de Rabat.
Le but ultime de la construction de cet édifice était pour rendre hommage aux 100.000 combattants de confession musulmane décédés, pour la France, lors de la première guerre mondiale.
L’intermédiaire dans ce processus de construction de la mosquée n’est autre que Hubert Lyautey qui a affirmé au Sultan dans une lettre, le jour même du lancement des travaux, que son nom a été hautement acclamé par l’assistance, notant que le premier coup de pioche a été donné par le grand vizir El Mokri, puis par les membres des diverses nationalités de confession musulmane.
La mosquée de Paris fut inaugurée quatre ans plus tard, en juillet 1926, en présence du Sultan Moulay Youssef et du président de la République Gaston Doumergue. Son premier recteur s’appelait Kaddour Benghabrit.
D’origine algérienne, Benghabrit fut naturalisé marocain et poursuivit ses études à l’Université Al Qaraouiyine de Fès, avant d’occuper diverses fonctions au Royaume, ce qui lui permit de se rapprocher du Sultan, d’où sa nomination à la tête de la mosquée de Paris.
Venons en à l’architecture de ce lieu emblématique.
Inspirée par la mosquée Al Qaraouiyine de Fès et construite à la fois dans le style du Maroc Almohade, la mosquée a été dessinée par l’architecte Maurice Tranchant de Lunel, inspecteur général des Beaux-Arts au Maroc, tandis que les plans ont été exécutés par les architectes Robert Fournez, Maurice Mantout et Charles Heubès.
Des artisans marocains ont été dépêchés spécialement de Fès à Paris pour embellir l’édifice et en faire un lieu unique et spécial, qui portera à jamais une touche purement marocaine, notamment le Zellije qui orne ses différents coins et recoins.
L’appropriation culturelle subie donc par la mosquée de Paris à l’occasion de ses 100 ans n’est pas la première tentative de « réécrire l’histoire » initiée par la France.
Après son inauguration en 1926, et alors même que le Maroc est en plein protectorat français et mouvementé par les agitations des nationalistes, plusieurs manoeuvres ont été observées dans ce sens avec pour seul objectif de changer le cours de l’histoire, et occulter les racines marocaines de cet édifice.
En effet, en 1954, François Mitterand, qui était encore ministre de l’Intérieur, avait estimé que la Mosquée de Paris était devenu un « haut lieu de nationalisme marocain » et le siège d’un mouvement en faveur du Roi Mohammed V, qui était à l’époque en exil, et dont le peuple réclamait le retour.
Ainsi, pour la France, tous les moyens sont bons pour écarter le Maroc de cet édifice qui a montré un certain pouvoir et une certaine énergie que seuls les musulmans arabes peuvent ressentir.
Après le coup de Mitterand, un autre homme d’État français poursuit sur cette même lancée en nommant en 1957 le Franco-algérien, Hamza Boubakeur, comme recteur de la Mosquée pour 25 ans, soit jusqu’en 1982.
Après plus de deux décennies à la tête de la mosquée, les ambitions du recteur vont en direction de son pays d’origine et à l’encontre des créateurs mêmes de l’édifice, en essayant de modifier coûte que coûte le statut de la société des Habous, fondée au Palais royal de Rabat, en laissant croire que cette même société aurait été créée à Alger en 1917.
Mais un certain Claude Lebel, ministre plénipotentiaire, a démasqué cette appropriation des lieux que tente de faire l’Algérie en 1962.
Claude Lebel adressa une lettre à l’État français faisant part d’une soi-disant « réapparition à Alger d’un prétendu bureau de la Société des Habous et des Lieux Saints, recréé de toutes pièces pour les besoins de la cause – dans le cadre de la procédure d’urgence – il convient d’ailleurs de noter la faible représentativité des membres non algériens de ce bureau ».
Un plan « minable » qui fut dévoilé au grand jour, selon la presse française, au terme d’un accord qui a été passé entre Hamza Boubakeur et le gouvernement algérien.
Malgré les nombreuses tentatives algériennes de s’approprier la mosquée de Paris, qui est la mosquée de tous les musulmans, avec la complicité flagrante de la France, l’histoire se souviendra toujours des initiateurs de ce grand édifice et des parties qui ont pris part à cette mascarade à tous les niveaux.
Mais tout est pour montrer et démonter que la Mosquée de Paris ne peut être que marocaine: dahirs, histoire, correspondances, architecture, zellige, etc.