Maroc : le prix de l’huile d’argan flambe
Maroc : l’huile d’argan voit son prix flamber
Le prix de l’huile d’argan au Maroc a connu une flambée spectaculaire, transformant un produit autrefois courant en un luxe inaccessible pour de nombreux Marocains. Longtemps considéré comme une ressource naturelle de base, l’huile d’argan, prisée pour ses usages alimentaires et cosmétiques, est désormais un bien réservé à une élite, conséquence de son succès fulgurant sur les marchés internationaux.
La forte demande mondiale, en particulier en Europe et aux États-Unis, exerce une pression considérable sur les prix, les propulsant à des niveaux jamais atteints auparavant. En conséquence, ce produit, profondément ancré dans les traditions et le patrimoine marocains, devient presque hors de portée pour les familles aux revenus modestes, qui l’utilisaient depuis des générations. Ironie amère, ce sont aujourd’hui les consommateurs marocains qui souffrent de l’exportation massive de cette huile précieuse, désormais convoité par les grandes marques mondiales de cosmétiques et de soins capillaires.
Cette situation est due à une combinaison de facteurs économiques et environnementaux. Tout d’abord, l’intensification de la demande internationale a stimulé les exportations à des prix élevés, rendant l’huile d’argan plus rentable à l’étranger que sur le marché local. Les grandes entreprises internationales, parfois en contrôle direct d’une partie importante de la production, achètent massivement l’huile à des prix d’or pour alimenter l’industrie mondiale de la beauté, notamment dans les crèmes, shampooings et autres soins pour la peau, accentuant ainsi la raréfaction du produit dans les foyers marocains.
En parallèle, les conditions climatiques difficiles que traverse le Maroc, notamment la sécheresse prolongée, affectent fortement les régions productrices d’argan, principalement situées dans le sud-ouest du pays. La raréfaction des pluies et le manque d’eau compromettent la croissance des arganiers et la production de leurs fruits, réduisant la quantité d’huile disponible sur le marché. Le phénomène du surpâturage aggrave la situation : les troupeaux de chèvres et de moutons, souvent élevés en liberté par les bergers nomades, dévorent les jeunes pousses d’arganiers, empêchant leur renouvellement et affaiblissant les arbres plus anciens, ce qui diminue leur capacité à produire des noix.
L’effet cumulatif de ces pressions – climatiques, économiques et commerciales – a pour conséquence directe de raréfier l’huile d’argan sur le marché intérieur. Les petits producteurs locaux, qui autrefois approvisionnaient principalement le marché marocain, préfèrent désormais vendre leur production à des intermédiaires étrangers à des prix bien plus attractifs, créant une pénurie locale. De plus, l’intervention des multinationales et leur contrôle croissant sur le secteur de la production d’argan contribuent à élever les prix de vente et à orienter l’huile vers les marchés étrangers.
Face à cette situation, l’huile d’argan, produit phare du patrimoine culturel et économique marocain, se retrouve à la croisée des chemins : appréciée et valorisée à l’échelle internationale, elle est de moins en moins accessible aux Marocains eux-mêmes. À moins d’une régulation du marché ou d’une gestion plus durable des ressources naturelles, cette tendance pourrait s’aggraver, privant encore davantage les Marocains d’une ressource courante pendant des siècles, qui devient de plus en plus un luxe.
À lire aussi :